Lorsque l’historien, le sociologue ou l’observateur attentif constate qu’une collectivité est en crise, qu’elle est déstabilisée, qu’elle se cherche un avenir, il apparaît immédiatement que les institutions sont pareillement chahutées et qu’elles connaissent de profonds et pénibles bouleversements. Dans un tel contexte, elles me font penser à un nageur qui ne parviendrait plus à prendre son souffle et a fortiori à tenir le rythme.
L’exemple français
L’histoire regorge d’exemples, notamment chez notre grand voisin français : pensez à la succession de régimes politiques et de gouvernements de toute nature dans la France post-révolutionnaire jusqu’à 1870 et la fondation de la IIIe République. Il n’y eut pas moins de sept régimes différents (trois monarchies constitutionnelles, deux républiques et deux empires). Pensez, dans l’histoire plus récente, à la valse des présidents de la Ve République alors que le pays est installé dans une crise sociétale dévastatrice et permanente depuis une quinzaine d’années au moins, valse jurant avec les longs mandats de Charles de Gaulle (10 ans), de François Mitterrand (14 ans) et de Jacques Chirac (12 ans).
La crise génère-t-elle le dégagisme ou le dégagisme génère-t-il la crise ?
La question qui se pose est de savoir où se trouve la cause et où commence la conséquence ; autrement dit, qui est apparu le premier entre la poule (ici le coq) et l’œuf (la crise). La raison admet évidemment que les deux phénomènes se nourrissent mutuellement : la crise structurelle, économique, financière et sociétale génère une crise institutionnelle qui nourrit la crise structurelle dans un mouvement de siphonage qui va jusqu’à poser des questions identitaires et existentielles : Qui sommes-nous ? Existerons-nous encore demain… du moins sous cette forme ? Dans un tel contexte, des personnalités nouvelles et inattendues émergent, parfois pleines de talents et de ressources, parfois aux valeurs et aux comportements plus sombres et ambigus ; pareillement, des mouvements et des partis nouveaux surgissent, parfois pour le meilleur, parfois pour le pire. Tout un système s’en trouve déstabilisé, les garants de l’équilibre démocratique disparaissant emportés par des vagues aux origines et aux ambitions incertaines. L’horizon se bouche et, dans la brume, s’agitent les spectres de tous les possibles, surtout les pires.
La stabilité est facteur de progrès sociaux
La prospérité sociale et le bien-être sociétal ne s’accommode jamais de la crise permanente. Paradoxalement, dans nos démocraties les choses n’avancent jamais si vite dans la direction du progrès que lorsque la société dans ses structures est stable et jouissant d’un sain équilibre. Pensons seulement aux progrès sociaux que connut notre pays entre 1946 (AVS) et 1982 (Prévoyance professionnelle et assurance chômage obligatoire) en passant par l’assurance invalidité (1959). La solidité institutionnelle de la Suisse n’est pas pour rien dans l’incroyable succès que connaît globalement notre pays depuis les trente glorieuses et, dans ce cadre-là, le libéralisme parfois outrancier qui est à l’œuvre dans notre pays n’a pas empêché le développement d’un État social, certes perfectible, mais solide notamment grâce à l’impulsion déterminée et obstinée du parti socialiste suisse.
Le cas de La Chaux-de-Fonds
Qu’en est-il de La Chaux-de-Fonds ? Depuis le début des années 2000, les crises financières, économiques et partiellement d’identité se succèdent. Il y eut même l’une ou l’autre crise institutionnelle de mauvais alois ayant pour corollaire des institutions fragilisées ; cette fragilité permettant l’émergence de personnalités troubles ainsi que de nouveaux partis et induisant un renouvellement effréné du personnel politique. Entre 1988 et 2004, soit durant quatre législatures, la ville de La Chaux-de-Fonds connut huit conseillers communaux différents (je les cite par ordre de longévité) : Charles Augsburger, Georges Jeanbourquin, Alain Bringolf, Daniel Vogel, Jean-Martin Monsch, Claudine Stähli-Wolf, Didier Berberat et Lise Berthet. Durant cette période, même si tout ne fut pas facile et réussi, force est de constater que la ville fut préservée de toute crise institutionnelle. Les quatre législatures suivantes, soit entre 2004 et 2020, virent se succéder deux fois plus de conseillers communaux, soit seize, que je renonce à citer tant certains passages furent fugaces et d’autres malheureux. Ces seize années furent marquées par nombre de crises institutionnelles et politiques, hypothéquant la capacité de notre ville à trouver les ressources nécessaires à affronter les défis et parfois les vicissitudes qui se présentaient. Durant cette période, une seule législature ne connut aucun départ prématuré de membres de l’exécutif, cette législature-là peut être qualifiée de solide, il s’agit de la dernière (2016-2020), qui est également la seule qui ne connut aucune crise institutionnelle et politique.
Le parti socialiste garant des valeurs qui fondent nos institutions
Ce rappel historique m’amène naturellement à enjoindre nos concitoyennes et nos concitoyens à faire le choix de la stabilité et de la continuité dans la gouvernance de notre ville, en soutenant le parti qui représente le mieux le nécessaire équilibre entre la défense des institutions comme cadre indispensable à l’activité démocratique et l’ambition du progrès, qu’il soit social ou sociétal. Le grand soir, afin de respecter tout un chacun et l’esprit de notre démocratie, ne peut être qu’une succession de belles soirées profitables au bien commun. Ces valeurs universelles de solidarité, de respect et de progrès sont les fondements du parti socialiste. En d’autres termes, confirmer les deux sièges socialistes du Conseil communal et renforcer la représentation socialiste au Conseil général revient à favoriser le traitement des enjeux qui nous attendent dans le plus strict respect des institutions démocratique et de l’ensemble de la population dans une perspective non pas conservatrice mais résolument progressiste.
Théo Huguenin-Élie