Nous sommes en 1999, je jette un regard sur ce siècle qui touche à sa fin. L’histoire d’une ère complexe pendant laquelle l’humain a été capable du pire comme du meilleur.

Nous sommes en 1999, j’ai 20 ans, et comme une partie des jeunes de ma génération, je suis emplie de l’espoir que nous entrons dans une nouvelle ère pacifiée, plus humaniste, plus solidaire et plus consciente.

Quatre ans sont passés et ont peu à peu emporté les espoirs associés au nouveau millénaire en plongeant le monde dans une nouvelle dynamique à laquelle la Suisse n’échappe évidemment pas.

Je regarde la télévision, incrédule face à ce qui est en train de se jouer à Berne.

Nous sommes le 10 décembre 2003, c’est l’élection au Conseil fédéral.

Je lâche un cri de rage.

Mon fils de deux ans, qui joue à mes côtés, me demande ce qu’il se passe.

Je lui réponds que je suis en colère ; mais aussi que j’ai peur pour notre avenir, pour nos acquis et pour les combats que nous devons encore mener socialement. Ce n’est pas uniquement l’élection d’une seule personne qui me met dans cet état, c’est le mouvement de repli qu’elle symbolise pour le pays qui a accueilli mes parents immigrés et dans lequel j’ai eu la chance de grandir, de m’instruire et de me forger un avenir.

Évidemment, il n’a pas compris… il m’a juste demandé : et tu vas faire quoi ?

Je lui ai répondu que la seule chose à faire était de s’engager.

Camarades,

Je ne suis pas la seule à avoir pris conscience ce jour-là ou les mois qui ont suivi qu’il ne suffisait pas d’être convaincu par des valeurs pour que la société change : la mue passe par la mobilisation.

Si je vous raconte tout cela, c’est pour vous expliquer ce qui pour moi a agi comme un déclencheur.

Car, c’est motivée par cette envie de contribuer à construire cet idéal humaniste, social et solidaire que je me suis engagée en 2004 au parti socialiste avec la ferme intention de m’investir à fond.

Élevée dans une éducation ibéro-patriarcale et donc profondément féministe depuis toujours, quel bonheur de pouvoir faire mes premières armes de militante officielle dans la campagne pour l’assurance-maternité. Une expérience intéressante qui n’a fait que renforcer ma motivation.

Début 2005, le comité me demande de reprendre la présidence de la section de La Chaux-de-Fonds dès le mois de mai.

Je viens d’achever mes études de droit.

Je suis enceinte de 6 mois.

Je ne suis pas encore naturalisée… Je réponds évidemment… OUI.

Parallèlement, je prends conscience que l’engagement politique prendra une place importante dans ma vie et par ricochet dans celle de ma famille. Ce n’est pas une fatalité camarades, mais un choix délibéré et conscient : changer les choses ce n’est pas se lamenter dans son coin ou au café du commerce, mais bien se lever et entrer dans le combat.

Aujourd’hui je me retrouve face à vous pour vous présenter les motivations qui m’ont conduit à déposer ma candidature à la candidature pour la liste du PSN au Conseil des États. Elles sont multiples, j’en développerai donc trois :

La première ? L’envie profonde de m’investir au niveau fédéral dans une action volontariste et socialement responsable dans une période où nos sociales démocraties sont mises à mal.

Entre la fin de siècle que j’évoquais et le moment où je vous parle, vingt ans ont passé.

Si nous, les jeunes que nous étions à l’époque, nous avons rapidement déchanté face aux espoirs avortés du nouveau millénaire, une autre réalité s’est imposée à nous.

Celle de la fragilité d’une mémoire historique qui doit à la fois nous rappeler :

  • ce qu'est l’essence des progrès sociaux pour lesquels nos prédécesseurs se sont battus ;
  • en quoi les principes de solidarité sont nécessaires à la cohésion sociale ;
  • et à quoi risque inexorablement de mener le repli sur soi.

La conséquence ? L’écho de la fronde menée contre les acquis sociaux et contre l’ouverture au monde, alors qu’en parallèle il reste encore tant à faire pour atteindre une société de l’égalité des chances, de la justice sociale et de la conscience écologique.

La majorité bourgeoise veut nous enfoncer dans le chemin d’une société à deux vitesses. Nous en avons l’illustration constante, il suffit de se pencher sur les quelques décisions emblématiques qu’elle a prises ces derniers mois, notamment concernant les franchises d’assurance-maladie, la loi sur le CO2, l’égalité…

Si la société civile est en train de se mobiliser, notamment sur l’urgence climatique et l’égalité, au niveau politique, le parti socialiste est l’un des seuls à se préoccuper des enjeux d’égalité des chances et de justice sociale.

Le PS est aussi la principale, voire parfois la seule force de proposition dans ces domaines et le seul parti attaché à ce que ces politiques soit cohérentes et ne se jouent pas les unes contre les autres.

Il y a un axe de bataille qui illustre bien ce propos. Et il se trouve que c’est précisément le thème qui m’a été attribué. Permettez donc que je m’y arrête quelque instants.

Vous ne serez pas étonnés que, dans mon âme d’ancienne syndicaliste et de collaboratrice d’un département en charge de l’intégration, je sois particulièrement préoccupée par la thématique de l’emploi.

Camarades, il y a 200'000 demandeurs et demandeuses d’emploi dans ce pays. Certains estiment que c’est peu au regard de la réalité des pays qui nous entourent.

C’est une vérité relative.

Je vous propose pour ma part de nous arrêter sur une réalité absolue :

  • celle des personnes dans cette situation auxquelles on devrait expliquer que le chômage n’est pas un problème dans notre pays ;
  • la réalité des cantons qui souhaitent amener plus de cohérence entre les différents systèmes de soutien ; ils sont alors entravés par des logiques fédérales basées sur le fait que le chômage n’est pas un problème ;
  • la réalité qui veut qu’un canton qui a un taux élevé de personnes au chômage soit pénalisé financièrement par la Confédération en matière de participation aux mesures du marché du travail.

Le Parti socialiste a toujours fait des enjeux liés à l’emploi et aux conditions de travail, l’un des piliers de son action.

Samedi dernier, il a validé en assemblée des délégués son papier de position affirmant douze propositions fortes visant à un emploi et à une formation pour toutes et tous.

Dans ce papier, il a pris la mesure de l’ampleur du problème actuel, mais aussi de la bombe à retardement que constitue l’absence de stratégie fédérale de soutien à la formation des personnes peu ou pas qualifiées.

Des personnes dont le risque de se retrouver au chômage et d’y rester durablement est important.

Un risque accru du fait de l’évolution de l’emploi et des impacts de la révolution numérique.

Ces prises de positions mettent par ailleurs un accent particulier sur trois publics à risque : les plus de 50 ans, les personnes issues de la migration et évidemment… les femmes.

Comment ? En exigeant des actions concrètes tant sur la formation continue que la reconversion en cours d’emploi, tant sur l’accès financier à la formation que par la participation des employeurs à cet accès, tant par la mise en cohérence des politiques de soutien que sur l’avancée nécessaire dans la reconnaissance des titres et de l’expérience.

Réaffirmer nos positions dans ce domaine ce n’est pas une tarte à la crème comme j’ai pu l’entendre ici où là auprès de sceptiques. La ligne du parti socialiste est une ligne nécessaire au vu des enjeux en présence et essentielle à l’heure où la droite fantasme notamment sur un assouplissement des règles du droit du travail.

Agir concrètement par les leviers de la formation pour combattre le chômage et investir dans ce domaine devrait pourtant être une évidence pour tout le monde.

Travailler sur cet axe,

  • c’est améliorer l’accès au développement de compétences des travailleuses et travailleurs ;
  • c’est affaiblir le risque de se retrouver au chômage ;
  • c’est pouvoir prétendre des conditions salariales plus élevées.

Mais parallèlement, c’est aussi améliorer la mise à disposition de compétences pour l’économie et potentiellement augmenter le pouvoir d’achat des personnes. C’est donc l’ensemble de la collectivité qui en profite et le parti socialiste l’a bien compris.

Passons maintenant à ma seconde motivation : La conviction que l’esprit neuchâtelois peut véritablement contribuer à faire évoluer les choses, et mon envie d’y participer. Eh oui camarades, je pense humblement mais sincèrement que notre canton a, malgré le caractère menu de son territoire, un véritable rôle à jouer.

Il a fait figure de pionnier dans de nombreux domaines qui nous tiennent à cœur, notamment en matière de droit de vote des femmes cantonal, dont nous fêtons cette année le soixantième anniversaire.

Mais aussi dans le domaine de l’intégration des personnes issues de la migration.

D’autres domaines d’inspiration pourraient, à l’avenir, créer des émules.

Parmi ceux-ci, une révolution récente, qui a marqué notre canton, m'a aussi marquée personnellement tant dans ma vie politique que professionnelle. Je veux parler évidemment du salaire minimum.

Inutile de vous rappeler le rôle important que notre parti a joué dans ce nouvel acquis social. Au niveau fédéral, certains s’inquiètent ! Car la démonstration par l’acte que cela peut marcher sans que l’économie ne s’effondre — ce que nous prédisaient d’aucuns — met à mal leurs arguments fondés sur une politique néo-libérale.

Ma troisième motivation, est un peu au croisement des deux premières.

Il s’agit de celle de m’investir dans une campagne, puis, en cas d’élection, sous la coupole fédérale, pour conjuguer la défense d’une politique fondée sur des valeurs socialistes, et la défense des intérêts de la collectivité neuchâteloise.

Nous vivons dans un territoire qui a ses particularités. Tout en étant relativement restreint, il est à la fois le baromètre conjoncturel de la Suisse, et sa principale source de production d’industrie manufacturière et d’innovation.

Mais c’est aussi un canton : urbain, périphérique et frontalier. Un profil qui souvent ne semble pas entrer dans les cases étroites des politiques fédérales que ce soit notamment au niveau économique ou social.

Si nous souhaitons nous battre pour que la population neuchâteloise ne soit pas laissée pour compte, il faut que la délégation à Berne soit convaincue, énergique et investie. C’est d’autant plus important lorsque nous n’avons que six sièges entre les deux chambres. Le travail qui a été fait, et qui reste encore à faire durant ces prochains mois cruciaux, par nos deux sortants est extraordinaire et je profite de ces mots pour les en remercier. Mais ils se sont souvent retrouvés pratiquement seuls à devoir chercher des alliances pour défendre nos intérêts. S’engager dans une campagne fédérale sous nos latitudes, c’est aussi assumer dans cette même campagne, comme en cas d’élection, la responsabilité de s’investir pour que la voix neuchâteloise soit entendue et conforme à ce qu’exprime notre population qui, dois-je le rappeler, dans une très large majorité des cas, suit les recommandations socialistes.

À ces trois motivations s’ajoute encore mon sentiment de pouvoir apporter une contribution de par les compétences et expériences acquises au fil des ans tant au niveau politique, professionnel et personnel.

  • Figurer sur la liste au Conseil des États du seul parti qui peut véritablement influencer la tendance,
  • participer à cette campagne aux côtés de neuf camarades investis et expérimentés,
  • battre le pavé avec vous toutes et tous camarades,

voilà une motivation supplémentaire qui n’est pas des moindres pour mener une campagne qui sera certainement intense.

Une campagne qui s’inscrit dans l’objectif global rappelé par notre président du parti suisse de renverser une majorité qui nous mène dans une voie sans issue.

Camarades, c’est pour toutes ces raisons que je sollicite votre confiance aujourd’hui en vous donnant l’assurance d’un investissement sans failles au service de nos valeurs.

Fleurier, le 9 mars 2019
Silvia Locatelli

2019-03-11